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Lecture : Coup de cœur pour… la Veuve Scarron

Certes, il ne s’agit pas d’une biographie ou d’un ouvrage d’historien sur la vie Madame de Maintenon. Mais c’est plus que ce que l’on pourrait appeler une biographie romancée. En effet, le travail de Françoise Chandernagor est sous-tendu par une érudition vaste et détaillée…

Françoise Chandernagor

L’Allée du Roi – Souvenirs de Françoise d’Aubigné, marquise de Maintenon, épouse du roi de France

(nombreuses éditions Juillard ou Gallimard)[clear]

Certes, il ne s’agit pas d’une biographie ou d’un ouvrage d’historien sur la vie Madame de Maintenon. Mais c’est plus que ce que l’on pourrait appeler une biographie romancée. En effet, le travail de Françoise Chandernagor est sous-tendu par une érudition vaste et détaillée en ce qui concerne l’histoire politique, économique, sociale et culturelle de la période couverte (sa bibliographie indicative en fait foi), mais également par une connaissance très aiguë et très fine de l’âme même de celle qui devient l’épouse morganatique de Louis XIV, grâce notamment à une familiarité très intime avec l’impressionnant corpus de correspondance émanant de la Marquise.

La plume alerte et précise de Françoise Chandernagor fait surgir le décor de l’enfance provinciale et miséreuse de la future “Première Dame de France”, l’atmosphère libertine et frondeuse du salon littéraire de Paul Scarron, les ors et la pourpre de la Cour rongée par les luttes sournoises des courtisans et dominée par les royales maîtresses ; nous suivons Madame de Maintenon au gré de ses bonnes ou mauvaises fortunes, de ses semi-disgrâces à sa “faveur “, des femmes et des hommes qu’elle côtoya, de Ninon de Lenclos aux petits bâtards royaux, de Louis de Villarceaux aux fillettes de Saint-Cyr…

Quelques extrait afin de vous convaincre de la vivacité de l’écriture et du degré de précision des tableaux :

Grâce à l’amitié que [Madame d’Albret] prit pour moi, je pus pénétrer bientôt dans les meilleures maisons du Marais et être admise dans le cercle des femmes vertueuses et bien nées, que je n’avais jusqu’alors guère eu l’occasion l’approcher à « l’hôtel de l’Impécuniosité » ou chez Ninon.” (p.139)
L’usage immodéré des liqueurs aidait aussi à faire passer les journées d’une jeunesse qui ne trouvait rien qui contentât son désir insatiable de plaisir. Des duchesses des quinze ans trouvaient plaisant de se réunir dans les entresols pour s’abrutir de vins et de liqueurs en compagnie de leurs laquais…” (p.379)

“Le lendemain, la duchesse du Maine, que je ne voyais jamais, envahit ma chambre sur le prétexte de me remercier, au nom de ses enfants, pour l’édit de Juillet. Piquante, brouillonne, agitée, la minuscule « Dona Salpetria », comme on la nommait, remplissait tout l’espace à elle seule.” (p.608)
Ce brillant ouvrage a fait l’objet d’une adaptation cinématographique de grande qualité, par la réalisatrice Nina Companeez (téléfilm en deux parties de 1995). Le duo Dominique Blanc – Françoise d’Aubigné & Didier Sandre – Louis XIV est servie par des dialogues efficaces, une mise en scène soignée, des décors magnifiques (certaines scènes ont été tournées au château d’Ambleville), et d’autres acteurs tout aussi excellents (extraordinaire Valentine Varela en volcanique Madame de Montespan…).

H.T.

 
Étiquettes : Dernière modification: 30 décembre 2013
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