Rédigé par 16 h 58 min CDs & DVDs, Critiques

Sauce piquante : “Convidando está la noche aquí de musicas varias.” (Sor Juana Ines de la Cruz)

La découverte de la musique baroque des Amériques n’est plus à faire, des ensembles tels que Elyma de Gabriel Garrido, Le Concert des Nations de Jordi Savall ou L’Arpeggiata de Christina Pluhar se sont chargés de débusquer et de ramener des lointaines jungles, missions et villes ensoleillés ces petits bijoux ciselés dans les forges syncrétiques du Nouveau Monde.

Salsa baroque

[TG name =”Liste des airs”]

Anonyme (collection Flores de música, 1706 – 1709) : Chacona
Anonyme (publié à Cuzco, Perú, 1631) : Hanacpachap cussicuinin
Anonyme (coll. Flores de música) : Differenzias sobre la Gayta
Gaspar Fernandes (c. 1570 – 1629) : Tleycantimo choquiliya
Anonyme (coll. Flores de música) : Xácara
Juan de Araujo (1648 – 1712) : Los cofl ades de la estleya
Anonyme (coll. Flores de música) : Pasacalles de 2o tono 2:27
Henry de Bailly (c. 1585 – 1637) : Yo soy la locura (du Ballet de la follie)
Domenico Zipoli (1668 – 1726) : Pastorale
Anonyme (coll. Truxillo del Perú II, c. 1780) : Lanchas para baylar
Domenico Zipoli : Battalia imperiale
Antonio de Salazar (c. 1650 – 1715) : Tarará
Anonyme (coll. Flores de música) : Temblante estilo italiano 3:05
Gaspar Fernandes : Xicochi Conetzintle
Santiago de Murcia (1673 – 1739) : Marizapalos, La Jotta
Anonyme (coll. Flores de música) : Discurso con ecos
Juan García de Zéspedes (1619 – 1678) : Convidando está la noche

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Shannon Mercer – Soprano
Esteli Gomez – Soprano
Scott Belluz – Alto
Joel Gonzalez – Ténor
Philippe Martel – Basse 

Ensemble Caprice
Direction Matthias Maute

60’01, Analekta, 2010.

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La découverte de la musique baroque des Amériques n’est plus à faire, des ensembles tels que Elyma de Gabriel Garrido, Le Concert des Nations de Jordi Savall ou L’Arpeggiata de Christina Pluhar se sont chargés de débusquer et de ramener des lointaines jungles, missions et villes ensoleillés ces petits bijoux ciselés dans les forges syncrétiques du Nouveau Monde. Aux antipodes de bien de musiques, tout comme ces terres vertes au delà des mers, le style hispano-américain se base sur l’adaptation des règles du baroque avec des ornementations indigènes, ce qui rend le mélange riche dans sa forme et nouveau dans ses couleurs. Tout comme la musique portugaise dont le syncrétisme peut encore être senti, avec les apports des colonies d’Afrique et du Brésil, les musiques de ce récital regorgent d’influences amérindiennes et d’ascendance noire. En effet, c’est un voyage à travers l’Atlantique, des danses héritées d’une Espagne encore mauresque jusqu’aux langues qui se délient dans des rythmes napolitains de Zipoli.

Nous notons avec enthousiasme que l’Ensemble Caprice et ses solistes réussissent à être en total accord avec les différentes variantes musicales du continent, appuyant sur la prononciation particulière du nahuatl ou du quéchua. Salsa Baroque est un témoignage fidèle, un éventail superbe des plus belles plumes du Nouveau Monde. L’invitation au voyage est signifiée par la variété de ce programme et par l’investissement des artistes, même si nous déplorons l’absence des compositeurs extraordinaires qu’étaient Juan Arañés ou Manuel de Zumaya, qui peut-être pourraient apparaître dans un prochain enregistrement de l’ensemble.

Comme bien de choses en Amérique Latine, certaines musiques patrimoniales sont davantage connues outre-Atlantique que dans les pays de leur composition. Tel est le cas de l’opéra perdu de Manuel de Zumaya, La Parténope, créé en 1711 au Palais Vice-royal de Mexico et premier opéra composé par un américain, son destin sommeille dans les poussières des archives et surtout dans l’oubli des chercheurs mexicains et le peu d’intérêt qu’ils manifestent à le chercher intensivement. Ce sont des initiatives heureuses telles que ce disque Salsa Baroque, qui, avec talent et engagement, nous font découvrir le sommet apparent de l’iceberg de la musique ancienne des Amériques.

Comme le dirait le fado magnifique “Transparente” : “Le Zambeze devient le Tage et les palmiers deviennent tournesols.” A l’ère de la mondialisation, comment oublier la marque mentale et culturelle de l’antique colonisation ibéro-lusitane sur les peuples qui se tournent vers les aïeules d’Europe ? L’héritage culturel est dans la continuité du syncrétisme, le mélange que la Péninsule Ibérique avait déjà subi et qui a laissé une trace indélébile, que ce soit dans les magnifiques cours de Séville ou dans celles, vertes et parfumées de Cartagena ou de Mexico.

Pedro-Octavio Diaz

Technique : captation chaleureuse, aérée et très colorée.

Site officiel d’Analekta avec écoute en ligne possible et livret téléchargeable 

Étiquettes : , Dernière modification: 11 février 2022
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