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6 janvier 2014

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Chronique Festival

 

"Ferveur & extase",

Stéphanie d'Oustrac, Ensemble Amarillis,  

Héloïse Gaillard et Violaine Cochard

 

 

Stéphanie d'Oustrac - DR

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"Ferveur et extase"

 

Francesco Cavalli : Canzon des Musiche sacre ; lamento de Didone

Barbara Strozzi : O Mario des Sacri Musicali Affetti

Biagio Marini : Sinfonia Primo Tuono, Sinfonia Sesto Tuono de l’op. 22

Claudio Monteverdi : Il Pianto della Madonna

Alessandro Scarlatti : airs de La Didone delirante et extraits de concertos

Michelangelo Faggioli : Didone abbandonata da Enea

Andrea Falconieri : Passacalle

Luigi Rossi : Les pleurs d’Orphée ayant perdu sa femme

 

Stéphanie d’Oustrac, mezzo-soprano

 

Ensemble Amarillis

dir. Héloïse Gaillard et Violaine Cochard

 

Lundi 17 décembre 2013, Nantes, La Cité

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Ferveur & extase

Au moment où la ville de Paris se dote d’un festival baroque, Nantes a choisi une autre formule : celle de la saison. Cette formule qui préfère étaler les concerts tout au long de l’année est bienvenue dans une ville qui accueille déjà une partie du Printemps des Arts et la Folle Journée, qui ont parfois tendance à phagocyter les attentions au détriment d’une vitalité artistique permanente. Et pour une première édition — on espère qu’elle sera suivie d’autres — l’affiche est plutôt brillante : La Simphonie du Marais, Stradivaria, mais aussi L’Éventail, À deux violes esgales, et ce soir-là Amarillis et Stéphanie d’Oustrac.

Le programme présenté par Amarillis, que nous avions pu chroniqué à Ambronay en 2010, ainsi qu'au disque, a été concocté en grande partie par Héloïse Gaillard et s'avère admirable de fluidité. On a rarement l’occasion d’entendre des concerts qui sont des juxtapositions de pièces éparses et ne le paraissent pas. C’est que les sinfonie retrouvent leur rôle : introduire et entrecouper les morceaux plus vastes, pièces vocales savamment choisies — surtout des raretés — pour présenter « l’amour aux deux visages » : la vertueuse Marie et la Didon passionnée, réunie toutes deux par la passion d’un être auquel elles ont été arrachées.

Il faut reconnaître que la première partie, celle consacrée à la Vierge, est plus courte. Aussi semble-t-elle moins bien aller à Stéphanie d’Oustrac, dont le tempérament de noble tragédienne s’épanouit pleinement dans les affres de Didon. Il reste néanmoins dans l’O Maria de Strozzi et Il Pianto della Madonna, non seulement une théâtralité nullement déplacée, surtout dans le second, mais aussi un timbre chaleureux, ample, et un sens de la retenue sans froideur qui rappelle que la dévotion n’est pas, en ce début du XVIIe siècle, dénuée de sensibilité, voire de sensualité — et comment ne pas penser, en entendant l’O Maria, au Bernin ?

La chanteuse peut se vanter par ailleurs d’une technique exemplaire : largeur de la tessiture, agilité des traits et appuis consonantiques du texte s’ajoutent à la beauté du son. Tout au plus certains pourront regretter un vibrato ample, qui ne nous a pas paru gênant : il ne nuit en effet pas au phrasé, à la clarté de la ligne mélodique.

Comme au disque, comme dans ses autres rôles — car c’est bien le rôle de Didon qu’elle endosse dans la seconde partie du concert —, Stéphanie d’Oustrac incarne et traverse les affects sans ostentation excessive ni histrionisme aucun. On ne peut qu’admirer la grandeur marmoréenne du lamento de La Didone de Cavalli, tout à l’image de son premier vers, « Porgetemi la spada del semideo troiano » : c’est bien la reine de Carthage qui s’exprime, et même dans la passion et la douleur, la couronne n’est pas loin.

À ses côtés, l’ensemble Amarillis, mené par Héloïse Gaillard aux flûtes à bec — elle joue finalement assez peu dans ce programme — et surtout Violaine Cochard au clavecin et à l’orgue positif, est un écrin choisi. Les cordes — et les flûtes d’Héloïse Gaillard — sont admirables de sobriété et d’équilibre, mettant en valeur la polyphonie ; le premier violon d’Alice Piérot ne masque point ni le second de Gilone Gaubert-Jacques, ni l’alto de Fanny Paccoud, plus en retrait. Il en découle l’impression d’entendre de la musique de chambre, entre quatuors à cordes et viol consort. Il faut faire mention spéciale du continuo, extrêmement vivant et expressif, mené par le violoncelle alerte de Frédéric Baldassare, soutenu par le violone de Ludovic Coutineau et l’archiluth de Monica Pustilnik, et dramatisé par le clavecin de Violaine Cochard, toujours attentive au texte chanté comme au résultat musical.

Un beau programme, d’excellents musiciens et musiciennes, deux bis (« O clemens » du Salve Regina de Pergolèse et la mort de Didon de Purcell) hors pairs, bref : une soirée de haut vol.

Loïc Chahine

 

 

 

 

 

 

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