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6 janvier 2014

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Chronique Concert

Molière & Lully, Le Bourgeois gentilhomme

Le Poème Harmonique, dir. Vincent Dumestre,

mise en scène Benjamin Lazar

 

 

D.R.

 

Molière (1622-1673) et Jean-Baptiste Lully (1632-1687)

 

 Le Bourgeois Gentilhomme, comédie-ballet.

 

Avec : Olivier Martin Salvan, Monsieur Jourdain ;

Nicolas Vial, Madame Jourdain ;

Louise Moaty, Lucile ;

Benjamin Lazar, Cléonte / le maître de philosophie ;

Anne Guersande Ledoux, Dorimène ;

Lorenzo Charoy, Dorante/ le maître d’armes ;

Alexandra Rübner, Nicole / le maître de musique ;

Jean-Denis Monory, Covielle / le maître tailleur ;

Julien Lubek, Le maître à danser.

 

Chanteurs :

Arnaud Marzorati, le Mufti / le vieux bourgeois babillard / l’élève ;

Claire Lefilliâtre, la musicienne / la femme du bel-air / l’Italienne ;

François-Nicolas Geslot, le premier musicien / la vieille bourgeoise babillarde / un Espagnol / un Poitevin ;

Serge Goubioud, un Gascon / un Poitevin / un chanteur ;

Jan van Elsacker, un Gascon / un chanteur ;

Emmanuel Vistorky, un Espagnol / l’homme du bel-air / un chanteur ;

Arnaud Richard, l’Italien / le Suisse.

 

Le Poème Harmonique

(Premier violon : Mira Glodeanu)

 

Direction musicale et guitare baroque : Vincent Dumestre

Mise en scène : Benjamin Lazar ; Chorégraphie : Cécile Roussat

 

2 mai 2010, Odyssud, Blagnac.

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Un final en véritable apothéose

Et oui les meilleures choses ont une fin, c’est la vie. Il faut accepter que (pour l’instant) ce Bourgeois miraculeux quitte l’Hexagone. Seule la ville royale de Madrid aura le droit de le revoir l’an prochain. Loin des larmes, c’est le bonheur et les rires de la joie qui ont accompagné cette dernière française à Blagnac qui a damé le pion à Toulouse sa voisine. Une belle standing ovation avec sifflements admiratifs comme rarement au théâtre classique a été de mise ! Mais si le théâtre est roi ce soir, et quel théâtre que celui de Molière quand ses mots sonnent si bien, c’est la musique en Reine absolue que nous célèbreront. Le Poème Harmonique retrouve en fait un orchestre sensiblement proche de celui de Cadmus et Hermione et l’apport de Mira Glodeanu en premier violon est fondamental. Ce Lully sonne idiomatique en diable avec, grâce à la magnifique direction de Vincent Dumestre, une petite touche d’élégance et de charme italien en prime. Lully débute dans l’opéra et ne renie pas encore complètement sa tendre patrie. Les chanteurs sont tous admirables, aussi beaux à voir qu’à entendre et distillant les mots aux saveurs restituées avec gourmandise. Quel abattage et quelle émotion !

Si la première partie nous laisse sur la faim au niveau musical, la montée en puissance de la deuxième partie, conduit par paliers progressifs à des sommets d’émotions. Le moment le plus intensément poétique est celui de la griserie ou les tables dansent sur une musique enivrante de sensualité. Le comble de l’audace théâtrale est évidemment la scène du Mamamouchi. Quelle fantaisie délirante, légèrement inquiétante associant la splendeur des couleurs des étoffes et des sons des instruments !

Mais c’est bien le divertissement conclusif qui porte l’estocade finale. Les Espagnols sont irrésistibles, nobles et désespérés, nous faisant passer du rire aux larmes, tandis que les Italiens portés par la mélancolie de la sublime voix de Claire Lefilliâtre nous séduisent sans retour. Cette voix immédiatement reconnaissable s’enveloppe aujourd’hui de superbes harmoniques rendant le médium et le grave plus solides et doux à la fois. Les aigus restent aériens, abellimenti et diminutions sont plus audacieux que jamais. L’art et le charme de cette diva est aussi de jouer la carte du jeu collectif le plus abouti avec une théâtralité généreuse.

D.R.

Car si le succès est acquis aujourd’hui pour ce spectacle qui a fixé les canons du beau pour longtemps, ce n’était pas gagné en 2005. Et les bougies ne sont pas acceptées partout, encore récemment (honte à Versailles !), le français restitué est toujours décrié par les Trissotin. Par contre l’élégance et la délicatesse de cette danse baroque étrange et proche à la fois, le jeu de face des comédiens avec une gestuelle si belle sont indiscutablement des réussites. Mais surtout, et cela c’est perçu particulièrement bien ce soir, c’est un esprit de troupe rare qui domine et s’impose à tout moment. La complicité est de tous les instants, la complémentarité des talents subjugue. Ce n’est pas étonnant, à regarder de prêt la distribution de nombreux artistes de la troupe du Poème Harmonique sont créateurs d’ensembles, d’orchestre et de spectacles divers rencontrant le succès public. C’est la mise en commun du meilleur de chacun qui permet d’atteindre cette splendide émotion qui convainc le spectateur le plus exigeant que la vie est belle quand les hommes se donnent la main. Le public très nombreux et particulièrement jeune de cette représentation supplémentaire a rompu les usages compassés des concerts en se levant, sifflant et tapant des mains et des pieds pour crier son admiration et sa gratitude aux 45 artistes, danseurs, comédiens, chanteurs et musiciens qui les ont enchantés durant un spectacle de quatre heures qui a passé aussi vite qu’un rêve.

Il faut dire que l’engagement des artistes a été total. Ils ont été portés par une salle enthousiaste à l’acoustique excellente en dépit de sa taille généreuse. De plus, la proximité de la fosse et de la scène a rendu les échanges confondants de naturel. Pas de doute, d’autres productions du Poème Harmonique y seront parfaitement à leur place... et le public est conquis d’avance.

© DVD Alpha

Ce spectacle baroque total, admirablement réussi a fondé un canon interprétatif qui fait date. En 50 représentations depuis 2005, c’est effectivement une troupe baroque nomade que n’aurait pas renié Molière lui-même. Des acteurs sensibles alternant tendresse et farce avec art. Tous ont progressé en souplesse rentrant dans leurs personnages comme dans une deuxième peau. Rendre hommage à ce Bourgeois dont la folie nous offre ce spectacle est bien la moindre des choses quand un superbe acteur comme Olivier Martin Salvan dégage une telle puissance communicative.

Merci à Vincent Dumestre, Benjamin Lazar et Cecile Roussat d’avoir conçu un spectacle visionnaire qui fait partie de ce qui ce voit de plus beau depuis longtemps. Et qu’un DVD a heureusement immortalisé en ces glorieux débuts.

Hubert Stoecklin

Site officiel d'Odyssud : www.odyssud.com

Site officiel du Poème Harmonique : www.lepoemeharmonique.fr

Lire aussi :

DVD : Jean-Baptiste Lully, Cadmus & Hermione, André Morsch, Claire Lefilliâtre, Arnaud Marzorati, Jean-François Lombard, Isabelle Druet, Arnaud Richard, Camille Poul, Le Poème Harmonique, dir. Vincent Dumestre. Mise en scène : Benjamin Lazar (Alpha, 2008)       

 

 

 

Affichage recommandé : 1280 x 800

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