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6 janvier 2014

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Chronique Concert

Piccinni, Atys (extraits)

Le Cercle de l'Harmonie, dir. Julien Chauvin

 

 

Julien Chauvin  © Alix Laveau

 

Niccolò PICCINNI

 

Atys (extraits)

 Tragédie lyrique en trois actes (1780)
Livret de Quinault, remanié par Marmontel.

Chantal Santon - Sangaride
Marie Kalinine - Cybèle
Mathias Vidal - Atys
Aimery Lefèvre - Celoenus

Les Solistes du Cercle de l’Harmonie
Julien Chauvin, direction et violon

24 septembre 2012, Théâtre des Bouffes du Nord, Paris.

 

Coréalisation Le Cercle de l’Harmonie, Théâtre des Bouffes du Nord
Coproduction Palazzetto Bru Zane – Centre de musique romantique française, Centre de Musique Baroque de Versailles

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"J’aime Atys, & je vois sa gloire avec plaisir…"

Nous ne pouvions manquer un Atys. Fut-il celui de Piccinni. Le 18e siècle a été friand du retour aux grands livrets de l'âge d'or de la tragédie lyrique, remis au goût du jour : nous vous parlerons bientôt du Thésée de Gossec qui sera redonné à Versailles, l'Armide de Gluck représente l'une des illustrations les plus réussies de ce procédé. Avant cet Atys, Piccinni s'était déjà attaqué à Roland dès 1778 et a su avec grâce respecter la structure dramatique de Quinault, avec la complicité de Marmontel.

Cet Atys, créé sans trop de succès en Février 1780, repose sur un livret adapté encore une fois par Marmontel qui sacrifie le Prologue à la gloire du souverain (désormais passé de mode depuis un bon moment) mais aussi les divertissements. En outre, afin que le compositeur puisse introduire des da capos, le poète a très souvent inséré des vers supplémentaires, à dire vrai assez vains et décoratifs, qui altèrent la fluidité de la trame narrative mais offrent autant d'écrins à la musique. Enfin, le dénouement ne respecte plus l'original de Quinault fondé sur Ovide avec la métamorphose d'Atys en pin, lui substituant un sombre suicide qui fut mal reçu par le public mais demeure plus satisfaisant que l'artificiel lieto fine de la reprise de 1783. 

On regrettera que cette recréation d'Atys, bien qu'indéniablement réussie et portée par une équipe enthousiaste, soit doublement incomplète : incomplète d'abord par les nombreuses coupes pratiquées, si nombreuses d'ailleurs, que le programme annonce avec honnêteté qu'il s'agit d' "extraits" de l'oeuvre, sélectionnés avec soin, mais qui resserrent considérablement l'action, et la rendent très heurtée et peu intelligibles pour ceux qui n'étaient pas familier du livret de Quinault. Incomplète aussi et cela va de pair, car le Cercle de l'Harmonie se réduisait ce soir huit instrumentistes dont Julien Chauvin et quatre solistes, proposant une transcription réduite, telle qu'elle se pratiquait à l'époque. Ces effectifs décimés par la crise n'ont donc pas permis d'entendre certaines grandes pages attendues tel le Sommeil et le chœur des Songes, et il faut espérer que le concert de ce soir n'était que l'avant-goût  d'une résurrection intégrale bien méritée.

Chantal Santon - DR

Bien méritée en effet car l'écriture de Piccinni ne manque pas d'attrait, ni de fraîcheur mélodique, et les solistes du Cercle de l'Harmonie, malgré leur faiblesse numérique, ont réussi tout au long de la représentation à maintenir une belle homogénéité et un son quasi-orchestral, même si l'on aurait souhaité bien plus de cordes pour jouer sur les textures et les effets de masse. L'ouverture, dynamique et enlevé, fait valoir de beaux bois, et un aspect galant bien marqué, tandis que les solistes, à l'exception de la Cybèle un peu trop tendue de Marie Kalinine, ont accordé une attention louable à la diction et à la prosodie, rendant le texte parfaitement intelligible, et permettant de ce passer tant de livret que de surtitres. L'Atys de Mathias Vidal s'est particulièrement distingué, avec un timbre chaleureux, une émission très agile (air "Brûlé d'une flamme qui fait mon malheur" à l'aisance virtuose), et une incarnation complexe et sensible du personnage torturé entre son amitié pour Celoenus et son amour pour la sensuelle Sangaride de Chantal Santon. Cette dernière a campé une nymphe fière, tendre dans les aigus, vocalement très en verve, que ce soit dans des récitatifs accompagnés très théâtraux ("Atys est trop heureux"), dans les airs ("Est-il un destin plus cruel" expressif et extraverti, à l'inverse du traitement de Lully de la même scène nettement plus intimiste), ou dans les ensembles (très touchant duo amoureux avec Atys qui ferait oublier la vacuité des paroles "Hélas quelle est ma peine / Toute espérance est vaine"). Les "méchants" sont moins bien servis, le Celoenus d'Aimery Lefèvre, à la projection puissante et au timbre noble, n'a pas bénéficié de suffisamment d'airs pour réellement parfaire son personnage, tandis que la déesse sanguine et fougueuse de Marie Kalinine, trop belcantiste et vengeresse, bousculait quelque peu la métrique. Le quatuor pré-final "O pardonnez, puissants immortels" à la carrure pré-mozartienne a révélé un Piccinni moins convenu que dans le reste des airs entraînants et vifs présentés ce soir-là, augmentant encore notre curiosité quant aux merveilles absentes. Et nous conclurons tout de même, comparant les choux et les carottes, par un constat de vieux lullyste rétrograde : malgré les ardeurs piccinniennes, l'Atys de 1676, ça avait tout de même une autre allure ! 

Concert rediffusé sur France Musique le 24 octobre.
 

 

Viet-Linh Nguyen

 

Site officiel du Cercle de l'Harmonie : http://cercledelharmonie.fr

Site officiel du Théâtre des Bouffes du Nord : www.bouffesdunord.com

 

 

 

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