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mise à jour 6 janvier 2014
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Chronique Festival Haendel, Alcina Les Talens Lyriques dir. Christophe Rousset
Christophe Rousset © Les Talens Lyriques
Georg Friedrich HAENDEL (1685-1759)
Alcina (1735) Drame musical en trois actes, livret anonyme d'après un texte d'Antonio Marchi (remanié par Antonio Fanzaglia), inspiré de l'Orlando Furioso d'Arioste.
Karina Gauvin (Alcina), Ann Hallenberg (Ruggiero), Delphine Galou (Bradamante), Emiliano Gonzalez-Toro (Oronte), Olivier Lalouette (Melisso), Monica Piccinini (Morgane), Erika Escriba-Astaburuaga (Oberto)
Orchestre Les Talens Lyriques : Violons I : Gilone Gaubert-Jacques, Giorgia Simbula, Yuki Koike, Bérengère Maillard, Jean-Marc Haddad Violons II : Virginie Descharmes, Yannis Roger, Pierre-Eric Nimylowycz, Anne Millischer, Josepha Jegard Altos : Brigitte Clément, Sarah Brayer-Leschiera Violoncelles : Ophélie Gaillard, Marjolaine Cambon, Jérôme Huille Contrebasse : Gauthier Blondel Flûtes à bec : Michel Quagliozzi, Vincent Blanchard Hautbois : Gilles Vanssons, Vincent Blanchard Basson : Eyal Streett Cors : Lionel Renoux, Yannick Maillet Continuo : Ophélie Gaillard (violoncelle), Laura-Monica Pustilnik (luth), Stéphane Fuget (clavecin) Clavecin et direction : Christophe Rousset
Représentation du 12 juin 2012 à l'Opéra Royal de Versailles, dans le cadre du Festival "Le Triomphe de Haendel"
Les Plaisirs de l’Isle Enchantée
Dès l'ouverture, Christophe Rousset imprime un dynamisme réel dans cette partition dense et pleine de subtilité. Les Talens lyriques développent des sonorités onctueuses, attentives aux nuances ; ils souligneront avec force la trame orchestrale tout au long du concert, en y insérant avec doigté les arias (pas moins de vingt-six au total !) de ce chef d'œuvre du Caro Sassone. Alcina au timbre cuivré, relevé d'une pointe d'acidité, Karina Gauvin incarne magistralement le rôle. Elle débute par un "Di, cor mio, quanto t'amai" langoureux, forçant sa généreuse projection naturelle à une délicate retenue. Accompagnée par Rousset au clavecin, elle exprime de manière très émouvante les accents déchirants de sa sourde jalousie, qui lui vaudront de longs applaudissements. Dans le "Ah ! mio cor ! schermito sei !" (acte II), son abattage impressionnant cède ensuite la place à des pleurs déchirants, impeccablement scandés a mano par la contrebasse de Gauthier Blondel, qui lui vaudront un triomphe bien mérité. Les ornements du "Ombre pallide" sont un régal, de même que ceux des imprécations du "Ma quando tornerai" aux accents tranchants. Au final de l'acte III, "Mi restano le lagrime" s'étire en de longs reflets moirés... Ann Hallenberg incarne de son timbre très mat, totalement crédible pour un personnage masculin, le rôle central de Ruggiero. Elle ne nous a cependant pas entièrement convaincu : ses effets dramatiques sont à notre sens trop accentués, de sorte que, malgré un abattage spectaculaire, les ornements ont une fâcheuse tendance à devenir un peu mécaniques ("Di te mi rido" au premier acte). Le bel aria "La bocca vaga, quell'occhio nero" est chanté avec une affectation trop marquée, qui malmène la ligne de chant. En revanche l'air "Col celarvi", suivi du duo avec Melisso (au début du second acte) est excellent, dans une atmosphère hallucinatoire savamment entretenue par l'orchestre. Dans le "Mi lusinga il dolce affetto", la ligne de chant se fait plus déliée, s'ouvrant sur de magnifiques ornements filés sur un accompagnement céleste du luth de Laura-Monica Pustilnik, suscitant d'enthousiastes applaudissements. Mettons aussi au chapitre des passages réussis le "Mio bel tesoro", et le legato langoureux du "Verdi pratti", brillamment servi par l'orchestre. Mais la voix se fait à nouveau trop affectée pour l'air bravoure du troisième acte ("Sta nell'ircana pietrosa tana"). Posséder un timbre presque aussi mat que celui de Ruggiero ne constituait a priori pas un atout pour incarner Bradamante de manière crédible... Avec son velouté profond, son aisance dans les coloratures les plus redoutables, Delphine Galou s'impose toutefois comme une interprète idéale de ce rôle. Dominant de sa haute stature la scène, elle semble voler entre les ornements des arias peu nombreux mais redoutables qui lui sont dévolus. Successivement, un magistral "E gelosia" au premier acte, un "Vorrei vendicarmi" emporté de fureur au second, lui vaudront de généreux applaudissements.
Karina Gauvin © Michael Slobodian Côté masculin, Emiliano Gonzalez-Toro nous gratifie du velouté ensoleillé de son timbre de ténor, et d'une bonne expressivité (avec une volubilité gestuelle parfois un peu décalée dans cette représentation de concert) : espiègle dans le "Simplicetto ! A donna credi ?", enflammé dans le "E un folle, e un vile affetto", superbe enfin dans le "Un momento di contento" et son final triomphant. Olivier Laouette (Melisso) était-il pour sa part souffrant ce soir-là ? Si son timbre généreux de baryton aborde avec assurance le "Pensa a chi geme", des respirations mal placées le font trébucher, même s'il parvient à se rétablir dans un final tout à fait honorable. Pour revenir aux voix féminines, soulignons l'excellente prestation de Monica Piccinini dans le rôle de Morgane : timbre nacré, diction précise, expressivité exquise, elle papillone avec aisance parmi les ornements. Enjouée pour le "S'apre al riso", elle triomphe dans un "Tornami a vagheggiar" au timbre rieur dont les ornements cristallins s'enchaînent en une cascade harmonieuse qui clôt le premier acte. Citons encore la virtuosité du "Ama, sospira", où elle le dispute à un violon aérien, et l'émouvant "Credete al mio dolore" brillament relayé par le violoncelle d'Ophélie Gaillard. L'Oberto d'Erika Escriba-Astaburuaga est paré d'un timbre ouaté aux accents juvéniles pour exprimer le désespoir du "Chi m'insegna il caro padre ?". Les ornements du "Tra speme e timore" fusent avec bonheur, et le très attendu "Barbara ! Io ben lo so" récompense les attentes des aficionados, malgré quelques imperceptibles décalages dans les respirations. Notons enfin que les rares chœurs formés par ces solistes aux voix puissantes et à la personnalité affirmée manquent quelque peu d'homogénéité... Malgré nos quelques réserves, saluons l'exploit que constitue la réunion d'un plateau d'interprètes suffisamment aguerris pour aborder de manière convaincante ce chef d'œuvreh de Haendel, où les récitatifs réduits à leur plus simple expression laissent peu de répit aux chanteurs, entre des airs surabondants et virtuoses. Ce soir-là, maestro Rousset, le pari était réussi...
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