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6 janvier 2014

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Chronique Festival

Haendel, Saul,

The Sixteen, dir. Harry Christophers

 

 Harry Christophers  © Stu Rosner

 

Georg Friedrich HAENDEL (1685-1759)

 

Saul
Texte de Charles Jennens (HWV 53 - 1738)

Jonathan Best (Saul), Julie Cooper (Michal), Elizabeth Atherton (Merab), Anne-Marie Gibbons (David), Joshua Ellicott (Jonathan), Jeremy Budd (sorcière d'Endor), Tom Raskin (Amalécite), Ben Davies (Doeg), Stuart Young (Fantôme de Samuel)

Ensemble The Sixteen :
Violons I : Sarah Sexton, Huw Daniel, Sophie Barber, Ellen O'Dell, Nia Lewis, Sarah Moffatt
Violons II : Daniel Edgar, Jane Gordon, Theresa Caudle, Rebecca Miles, Katarina Bengston
Altos : Stefanie Heichelheim, Jane Norman
Violoncelles : Joseph Crouch, Imogen Seth-Smith
Violone : Jan Spencer
Flûtes : Chrisitne Garrat, Graham O'Sullivan
Hautbois : Hannah McLaughlin, Catherine Latham
Bassons : Sally Jackson, Zoe Shevlin
Trompettes : Robert Farley, Christopher Pigram
Trombones : Abigail Newman, Emily White, Stephen Saunders
Timbales : Robert Kendell
Harpe : Frances Kelly
Théorbe : Eligio Luis Quinteiro
Clavecin et Orgue : Alastair Ross
Orgue et Carillon : Julian Perkins
Sopranos : Emma Brain-Gabott, Julie Cooper, Grace Davidson, Sally Dunkley, Katy Hill, Alexandra Kidgell
Altos : Ian Aitkenhead, David Clegg, Daniel Collins, Chris Royall
Ténors : Simon Bertridge, Jeremy Budd, Nick Pritchard, Tom Raskin
Basses : James Birchall, Ben Davies, Tim Jones, Stuart Young
Direction : Harry Christopher

Concert du 24 juin 2012, à la Chapelle Royale de Versailles, dans le cadre du Festival "Le Triomphe de Haendel"

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Saul music

Après avoir souffert de troubles de santé au printemps et à l'été 1737, le Caro Sassone reprit sa création musicale en débutant véritablement sa collaboration avec Charles Jennens, qui devait se traduire par une fructueuse série d'oratorios (Le Messie, Israël en Egypte, Belshazzar). L'idée initiale de cette composition est en réalité antérieure, puisque Haendel avait sollicité Jennens sur cet épisode biblique dès 1735, année de la création d'Alcina. Sa gestation occupa trois longs mois, de juillet à septembre 1738. De fait, l'œuvre est d'une densité musicale tout à fait exceptionnelle : une richesse orchestrale exubérante (aux cordes habituelles s'ajoutent un second orgue, une harpe, un théorbe, des trompettes et des trombones), des chœurs à profusion, des airs qui s'enchaînent quasiment sans récitatifs, et six symphonies ! Le drame mêle le fonds biblique, les allusions politiques contemporaines et un drame humain, l'amitié de David et Jonathan, traitée de manière très elliptique. Car l'action est clairement tournée autour de la déchéance inéluctable de Saul, Haendel confiant pour la première fois un rôle-titre à une basse.

Dès l'ouverture, Harry Christopher semble tout à son aise dans la densité de l'orchestre, enchaînant sans peine à un premier mouvement aérien les langueurs puissamment modelées du mouvement lent. La virtuosité éclate au dernier mouvement, où le déchainement des timbales et des trompettes brille sans occulter le reste de la palette instrumentale ni le chœur flamboyant qui suit. Ce souci de l'équilibre restera constant tout au long du concert, il témoigne à notre sens d'une parfaite maîtrise de cette partition complexe. Tout au long de l'œuvre, l'exécution des passages proprement orchestraux est très soignée, les nombreuses symphonies y brillant comme autant de joyaux.

La voix puissante aux accents ténébreux de Jonathan Best traduit bien les divers états de Saul. Exprimant tour à tour le courroux de la jalousie ("What do I hear ?"), suivi d'imprécations tonnantes ("With rage"), sa colère ("A serpent") avant de lancer son javelot sur le jeune héros, il se fait onctueux pour tenter de rallier son fils Jonathan à sa cause ("As great Jehovah lives") à l'acte II. Signalons encore les deux accompagnatos du début de l'acte III, à la projection impeccable et à la diction soignée, sur les accents tragiques de l'orchestre. Julie Cooper, soprano au timbre de cristal, fait montre d'une ligne de chant fluide et moelleuse dès sa première apparition ("O godlike youth"). Elle aborde son "See, what a scornfoul air" servie par un orchestre fluide et ductile, avant le magnifique solo de carillon éxecuté par Julian Perkins, délicatement appuyé par les violons. Et son "Fell rage" donne lieu à un beau duo avec la flûte traversière de Christine Garrat. Citons aussi son magnifique duo avec David au second acte, où les deux voix se répondent puis s'unissent harmonieusement vers un superbe final, relayé par le choeur. Enfin le récit de la mort de son frère ("In sweetest harmony they lived") est particulièrement bouleversant. Fier contrepoint à la douceur angélique de sa soeur, Merab (Elizabeth Atherton) est une mezzo au timbre ambré, relevé d'une pointe d'acidité. Tantôt elle nous régale par son velouté raffiné : "An infant rais'd", délicatement accompagné par Frances Kelly à la harpe et Eligio Luis Quinteiro au théorbe (au premier acte), le phrasé délicat de la céleste supplique "Author of peace" (au troisième acte), où le violoncelle se mêle à la harpe et au théorbe. Tantôt sa voix se pare du tranchant de l'obsidienne pour affronter les redoutables ornements de son rôle : "What abject thoughts !", et surtout le pyrotechnique "Capricious man".

Anne-Marie Gibbons campe de son délicat timbre cuivré un jeune David plutôt crédible. Sa ligne de chant est soignée, sa projection assurée et bien stable, y compris dans les ornements ("O King"). Nous avons été séduits par sa prière nimbée d'émotion ("O Lord"), ornée d'un magnifique solo de harpe. Signalons encore les beaux duos avec Michal au second acte, l'évocation poignante de Jonathan au troisième acte ("Brave Jonathan") suivie de la profondeur de son désespoir ("For thee, my brother Jonathan"), repris par le chœur. Dans le rôle de Jonathan, la vigoureuse voix de ténor de Joshua Ellicott abrite un bon sens des nuances, ses attaques tranchantes faisant place à des accents plus mélodieux quand il s'adresse à David ("Birth and fortune I despise !"). De même, au final de l'acte I, le déchirant accompagnato "O filial piety" se mue en un décidé "No, cruel father, no !". Les airs de l'acte II brillent par la richesse de la palette du timbre : supplication émouvante du "Sin not, O King", ton prophétique dans le "From cities stormed". Jeremy Budd possède un timbre un peu trop rond pour incarner le rugueux rôle de la sorcière d'Endor de manière crédible, mais on ne se plaindra pas de la beauté de la voix dans l'invocation "Infernal spirits". La voix de basse caverneuse de Stuart Young est incontestablement appropriée au rôle du Fantôme de Samuel. Tom Raskins est un Amalécite fort honorable, et la voix de basse de Ben Davies campe un Doeg tout à fait crédible. 

On ne saurait achever cette critique sans souligner le rôle central et l'excellente qualité du chœur, d'une homogénéité solide et dont les différentes parties demeurent bien audibles au sein de cette partition dense. Parmi les passages les plus remarquables, mentionnons l'Halleluiah ! pyrotechnique du premier acte, l'atmosphère de foi proclamée au final du même ("Preserve him"), les superbes polyphonies du début du second acte ("Envy, eldest born of hell") et du final ("O fatal consequence"), et l'éclatant choeur final "Gird on that sword" aux attaques tranchantes. Les spectateurs présents ce soir-là rendirent justice à cette interprétation de haute volée par de nombreux applaudissements, qui justifièrent plusieurs rappels.

Bruno Maury

Le site officiel du Festival Haendel du Château de Versailles : www.chateauversailles-spectacles.fr

 

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