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mise à jour 20 janvier 2014
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Genre: musique de chambre Jean-Baptiste Antoine FORQUERAY (1699-1782) Pièces de viole (vol. I) Première, deuxième et cinquième suites
Musicall Humors Julien Léonard, basse de viole Thomas Dunford, théorbe François Guerrier, clavecin
Muso, 1 CD, 2011, 72’56
De bonnes humeurs
Forqueray reste un violiste un peu mystérieux. Les pièces de violes qui nous sont parvenues — sauf quatre, que nous connaissons par un le manuscrit Vm7 6296 de la BnF — ont été publiées par son fils, Jean-Baptiste-Antoine, deux ans après sa mort. Un seul petit livre donc, même pas quarante pages ! En comparaison des abondants cinq Livres de Marais, c’est très peu. Quarante pages qui exigent cependant de l’interprète gambiste une force et une virtuosité sans faille. Ces qualités, Julien Léonard les possède à fond. L’archet est sûr, le son personnel, doux mais sans amertume. Mais ce qui frappe, dès les premières mesures de l’allemande La Laborde, c’est la parfaite maîtrise musicale. Point ici de vaines démonstrations comme la virtuosité peut en fournir ! Tout est idéalement phrasé, justement caractérisé, sans excès, les doubles cordes dessinent très nettement les voix. Il y a même quelque chose d’un peu désespéré dans certains moments pourtant si techniquement exigeants : la musique l’emporte, et de très loin, sur la difficulté. Où entend-on une Forqueray si claire ? Les fusées, les bariolages liés, les sauts de cordes, tout est impeccable d’équilibre sonore et émotionnel. On est même tenté d’approcher (en tremblant, cela va de soi) le mot perfection. Les pièces les plus chantantes, comme La Cottin, font la part belle à de longues phrases mélancoliques, tandis que d’autres, comme La Portugaise, sont plus vindicatives, tout en gardant ce fond de nuages. Quand l’allégresse prend le dessus, les sautillements de La Bouron répondent à l’aimable et polie langueur de La Dubreuil, aux traits vainqueurs de La Leclair succède l’agréable et malicieux balancement de la chaconne La Buisson. La Rameau, pièce étrange, semble être devenue le vrai portrait du maître de l’harmonie du temps : grandiose, réfléchie, imprévisible, mais tellement émouvante. Dans son ensemble, la Cinquième Suite touche au sublime : l’énergie (La Guignon) et la mélancolie (La Léon), la noble fierté (La Montigni) et les soupirs (La Silva), c’est un condensé de sentiments exprimés avec justesse dans la musique. Rarement l’évidence a été telle. Chaque pièce semble avoir trouvé un caractère qui la distingue un peu des autres sans pourtant trancher avec les précédentes — le mot de "suite" garde tout son sens. La basse continue est assurée avec goût par François Guerrier au clavecin et Thomas Dunford au clavecin, qui forment un écrin sonore dans lequel la viole s’intègre, sans écraser son "accompagnement". Clavecin et théorbe remplissent l’espace sonore d’arpèges et de contrechants point du tout encombrants ; il ne s’agit encore une fois pas de se montrer mais bien de chanter. Il suffit d’écouter La Buisson pour se faire une idée de la variété que les trois instrumentistes savent apporter avec goût et invention. Le maître-mot est celui de dialogue : dialogue horizontal, quand la basse et la viole discutent, mais aussi dialogue vertical des voix toutes ensemble. Il n’y a pas de doute : c’est une version à connaître, à goûter, à garder, à réécouter… Il est bien écrit, au dos du disque, "vol. I" — nous attendons donc le second volume. Forqueray ne s’en portera que mieux. Et le répertoire de la viole est vaste, alors "Volez, jeunes héros !" À vous, à vos cordes Schenk, Kühnel, Morel et Dollé !
Technique : captation limpide, quoiqu'un peu sèche.
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Affichage minimum recommandé : 1280 x 800 Muse Baroque, le magazine de la musique baroque tous droits réservés, 2003-2014
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