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6 janvier 2014

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"Les Indes imaginaires"

Ensemble RosaSolis

 

 

Diego Velazquez, Portrait Gaspar de Guzman, comte-duc d'Olivarès, Grand Chambellan et chancelier des Indes de 1621 à 1643

© Museo del Prado, Madrid

"Les Indes imaginaires"
Musique instrumentale française

Ensemble RosaSolis

Guillaume Humbrecht, violon
Marieke Bouche, violon
Rebecca Gormezzano, violon
Géraldine Roux, alto
Nicolas Crnjanski, violoncelle
François Joubert-Caillet, viole de gambe
Julie Blais, clavecin

1er octobre 2010, église Saint-Christophe, Cergy

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"Le jardin de ce monde ne fleurit que pour un temps" (Gandhi)

Avant de s’échapper de ce décor francilien, pluvieux et froid, pour un voyage imaginaire sous les cieux plus cléments des contrées lointaines auxquelles rêvaient les contemporains de Louis XIV et de Louis XV, l’auditeur ne peut laisser d’admirer la charmante église Saint-Christophe de Cergy Village, aux murs romans et au portail Renaissance. Nous allons donc rêver d’un ailleurs, dans un cadre tout aussi élégant qu’intimiste, mais sans pour autant faire abstraction de l’ici...

En guise d’ouverture, l’ensemble RosaSolis - que nous avions pu récemment écouter à Brantôme - a choisi de nous présenter un programme autour de la musique française du début du XVIIIème siècle. On goûte ainsi l'exotisme très "françois" de "La Sultane", sonate de Couperin en trois parties (et non en cinq comme le veut le modèle italien). En effet, ainsi que l’explique Guillaume Humbrecht, "l’imagination d’un Ailleurs" provoquait surtout chez certains compositeurs "l’envie de composer autrement". Puis le quintette se transforme en sextuor pour décliner trois jolies pièces de Jean-Philippe Rameau, qui nous mènent jusqu’à la Perse ancienne, avec "La Coulicam". Suivent, séparés par un entracte, deux concertos de Michel Corrette, "Les Sauvages et la Fürstenberg", et "Les Voyages du berger fortuné aux Indes Orientales". Le ton et la direction sont donnés, et le rêve d’ailleurs se déplace de l’Empire Ottoman à l’Afrique, et jusqu’au Pérou et en Amérique du Nord, contrées évoquées ensuite par les neuf extraits des Indes galantes de Rameau.

"Comment peut-on être un Sauvage ?" Pour Rameau, Fuzlier et ses confères, cela passe par une musique qui se détache avec gourmandise des genres conventionnels, tout en reflétant l’insouciance et le raffinement d’une époque, d’une sorte d’âge d’or, voué aux plaisirs et à la galanterie, où le vernis Martin comme les chinoiseries sont de bon ton pour orner les hôtels parisiens.

RosaSolis a dévoilé une lecture rythmée et charmeuse de ce voyage en chambre. L'interprétation fluide et équilibrée, fait la part belle au noyau de cordes, avec en particulier de beaux timbres grainés des violons. L'Air [tendrement] de La Sultane révèle ainsi un lyrisme contenu et nacré, à la fois rond et mélancolique, même si RosaSolis s'avère encore plus à l'aise dans les mouvements vifs. Le dynamisme contagieux de Guillaume Humbrecht est relayé par les deux autres violonistes, Rebecca Gormezzano et Marieke Bouche, cette dernière dansant presque au rythme de son archet virevoltant chez Rameau, et par l’altiste Géraldine Roux. Le violoncelle de Nicolas Crnjanski et la viole de gambe de François Joubert-Caillet apportent une touche élégante à la basse continue, complétée par le clavecin sur lequel Julie Blais exprime son talent et dont on ne peut que regretter que le son soit un tantinet couvert par les autres instruments, ce qui est renforcé par l'absence d'un autre instrument à cordes pincées (pourquoi pas un théorbe par exemple ?). 

Que dire afin de conclure ce périple virtuel vers des Indes aussi évocatrices qu'imaginaires ? Des Indes qui n’ont cependant rien à avoir avec les Indes, si bien que nous ne pouvons résister au plaisir de citer ici quelques extraits d’une lettre d’un père missionnaire à son évêque :

"Au Maduré, le 1er juin 1700 

Mon Révérend père, je m’embarquai à Pondichéry vers la fin du mois de septembre 1699, sur un vaisseau de guerre français [...]. Enfin, après quarante jours de navigation, nous découvrîmes les montagnes du cap du Comorin, si fameux par les premières navigations des Portugais. [...] Quoique la côte fût remplie de bois et qu’il ne parût aucune habitation, je priai M. des Augers de me faire mettre à terre avec deux autres pères [...]. Quoiqu’il ne fût qu’environ midi, le soleil avoit déjà mis en feu les sables sur lesquels il nous falloit marcher. [...] il fallut ôter nos chapeaux de dessus nos têtes et nous les mettre sous les pieds pendant quelques temps, pour ne pas brûler tout à fait. Mais le soulagement des pieds, comme vous pouvez le juger, coûtoit cher à la tête".

(Nouvelles des Missions, extraites des Lettres édifiantes et curieuses ; Missions de l’Inde et de la Chine, Paris, Société catholique des bons livres, 1828)

Si les librettistes s’étaient inspirés de ces récits, leur production eût sans doute tourné à l’opéra comique...

Hélène Toulhoat

 

Festival baroque de Pontoise* (17 septembre - 24 octobre 2010, Pontoise et les alentours)

Site officiel du Festival : www.festivalbaroque-pontoise.fr

 

 

 

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